Comprendre le BSA : principe et fondements
Le Bon de Souscription d’Actions (BSA) est un instrument financier hybride conférant à son détenteur le droit — mais non l’obligation — de souscrire à une ou plusieurs actions d’une société à un prix fixé d’avance (le prix d’exercice), pendant une période donnée.
Il s’agit d’un outil à mi-chemin entre la dette et le capital, permettant à une entreprise :
- de lever des fonds sans céder immédiatement de capital,
 - de différer une éventuelle dilution,
 - et d’associer ses investisseurs à la performance future.
 
Les BSA sont souvent intégrés dans des montages plus complexes, comme :
- les OBSA (Obligations avec BSA),
 - les OC (Obligations Convertibles),
 - ou les OBSAR (Obligations Remboursables en Actions).
 
Fonctionnement général du financement via BSA
Étape 1 — Émission
La société émet des BSA selon une décision des associés.
Chaque BSA confère un droit de souscrire à une action à un prix déterminé.
Étape 2 — Souscription
Un investisseur (personne physique, fonds ou partenaire industriel) achète ces BSA, seuls ou associés à un prêt obligataire.
Le financement intervient immédiatement, tandis que la participation au capital reste différée.
Étape 3 — Période de détention
Pendant la durée du contrat (5 à 7 ans en général) :
- l’investisseur ne détient aucun droit de vote ni dividende ;
 - il peut exercer ou convertir les BSA selon des clauses définies (échéance, cession, défaillance…).
 
Étape 4 — Conversion ou remboursement : la logique inversée dans la franchise
Dans le cadre de la franchise, la finalité du BSA est radicalement différente de celle observée dans les montages financiers classiques.
👉 Dans la finance traditionnelle :
- Si la société performe, le détenteur exerce ses BSA pour entrer au capital et bénéficier d’une plus-value.
 - Si la société échoue, les BSA expirent sans valeur.
 
👉 Dans la franchise :
C’est exactement l’inverse.
Le BSA n’a pas vocation à être exercé lorsque tout se passe bien, mais à servir de garantie de protection en cas de défaillance du franchisé.
Le schéma est le suivant :
- Si le franchisé réussit, il rembourse intégralement son financement (capital + intérêts). Les BSA s’éteignent automatiquement sans être exercés.
 - Si le franchisé échoue (défaut de remboursement, liquidation, résiliation du contrat de franchise…), le financeur peut exercer les BSA et convertir sa créance en parts sociales afin de reprendre le contrôle de la société ou du fonds.
 
Ainsi :
- La réussite conduit à un remboursement total et à la non-exécution des BSA ;
 - L’échec déclenche la conversion pour protéger le financeur et le réseau.
 
C’est pourquoi, dans les contrats d’émission destinés aux réseaux de franchise, les clauses prévoient toujours :
- la caducité automatique du droit de conversion dès lors que le franchisé rembourse son prêt ;
 - et la conversion conditionnelle uniquement en cas de défaut de paiement ou d’événement grave.
 
⚖️ En d’autres termes :
Dans la franchise, le BSA n’est pas un outil spéculatif, mais un outil de sécurisation défensive. Le franchiseur ou le financeur ne cherche pas à entrer au capital d’un franchisé performant, mais à éviter de perdre un point de vente, un emplacement ou une enseigne si le franchisé échoue.
Intérêt du BSA dans la franchise
Dans un réseau de franchise, le BSA devient un levier stratégique de financement :
- Il permet de financer des franchisés qui ne disposent pas d’un apport suffisant ;
 - Il facilite le développement rapide du réseau sans dépendre exclusivement des banques ;
 - Il renforce la solidité financière du modèle, tout en maintenant une cohérence entre franchiseur, franchisés et investisseurs.
 
Trois grands modèles coexistent :
| 
 Modèle 
 | 
 Financeur 
 | 
 Pilotage 
 | 
 Risque supporté par le franchiseur 
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|---|---|---|---|
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 Structure externe 
 | 
 Société d’investissement ou partenaire financier 
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 Externe au réseau 
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 Faible 
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 Structure interne 
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 Société détenue par le franchiseur 
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 Interne au réseau 
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 Moyen à fort 
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 Modèle hybride 
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 Co-financement franchiseur / financeur externe 
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 Mixte 
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 Modéré 
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Le BSA appliqué à la franchise : logique et bénéfices
Pour le franchiseur
- Facilite le financement des franchisés : le franchiseur devient un facilitateur plutôt qu’un financeur direct.
 - Accélère la croissance du réseau : les ouvertures se multiplient sans immobiliser la trésorerie du groupe.
 - Renforce la crédibilité auprès des banques : un réseau structuré autour d’un modèle de financement clair inspire confiance.
 - Aligne les intérêts : la réussite du franchisé devient la réussite du franchiseur.
 
Pour le franchisé
- Accès facilité à des capitaux : complément utile au prêt bancaire et aux aides publiques.
 - Différé de remboursement : soulage la trésorerie au démarrage.
 - Accompagnement stratégique : le financeur et le franchiseur partagent un objectif commun de réussite.
 - Indépendance capitalistique initiale : le franchisé reste propriétaire de sa société tant qu’il rembourse.
 
Le financement via une structure extérieure au franchiseur
Principe
Le franchiseur s’appuie sur un acteur financier indépendant (fonds, plateforme, family office…) qui souscrit aux obligations ou BSA émis par les franchisés.
Le franchiseur n’intervient pas financièrement, mais joue un rôle clé de prescripteur et de garant moral.
Avantages
- Aucun impact sur la trésorerie du franchiseur.
 - Mutualisation du risque entre plusieurs franchisés.
 - Accès facilité à des financements alternatifs.
 - Rapidité de déploiement du dispositif.
 
Inconvénients
- Coût du capital souvent élevé (8 % à 11 %).
 - Perte de maîtrise sur les conditions de financement.
 - Risque réputationnel si les conditions deviennent pénalisantes pour les franchisés.
 - Clauses de conversion parfois déséquilibrées (cession forcée, entrée au capital).
 
Conditions de réussite
- Encadrement juridique clair (convention tripartite).
 - Communication transparente auprès des franchisés.
 - Taux de rendement raisonnable pour garantir la viabilité économique du point de vente.
 - Partenariat équilibré entre franchiseur et financeur externe.
 
Le financement via une structure interne au franchiseur
Principe
Le franchiseur crée une filiale ou un fonds interne qui finance directement les franchisés via des BSA ou des obligations convertibles.
Cette structure agit comme un mini fonds d’investissement intégré au réseau.
Avantages
- Contrôle total des conditions de financement.
 - Rentabilité complémentaire pour le franchiseur (intérêts + éventuelles plus-values).
 - Fidélisation forte des franchisés.
 - Cohérence totale avec le modèle économique du réseau.
 
Inconvénients
- Mobilisation de trésorerie importante.
 - Risque financier direct en cas de défaut.
 - Gestion administrative et juridique lourde.
 - Obligation de conformité stricte pour éviter toute requalification bancaire.
 
Facteurs de succès
- Constitution d’une SAS dédiée avec gouvernance indépendante.
 - Sélection stricte des franchisés financés (20 à 30 % du réseau maximum).
 - Reporting trimestriel standardisé.
 - Gestion du risque par la diversification géographique et sectorielle.
 
Comparatif synthétique des deux approches
| Critère | Structure externe | Structure interne | 
|---|---|---|
| Mobilisation financière | Aucune pour le franchiseur | Oui (trésorerie du groupe mobilisée) | 
| Risque | Limité au risque d’image | Financier direct | 
| Contrôle | Faible sur le financeur | Fort et total | 
| Rentabilité | Nulle (simple prescription) | Revenus d’intérêts et plus-values | 
| Complexité juridique | Modérée (partenariat) | Élevée (filiale + réglementation) | 
| Souplesse | Forte | Moyenne | 
| Impact stratégique | Croissance rapide, risque maîtrisé | Croissance maîtrisée, cohésion réseau renforcée | 
| Profil idéal | Réseaux en expansion rapide | Réseaux matures, solides financièrement | 
Risques transversaux à maîtriser
- Risque juridique
- Requalification en activité bancaire ou en prêt participatif illégal si non encadré.
 - Clauses de conversion à rédiger avec prudence pour éviter tout abus de dépendance.
 
 - Risque financier
- Surévaluation des capacités de remboursement des franchisés.
 - Effet domino possible en cas de défaillances multiples.
 
 - Risque d’image
- Mauvaise communication autour des conditions de financement pouvant entacher la réputation du réseau.
 
 - Risque de gouvernance
- Nécessité d’un reporting régulier, transparent et documenté auprès du réseau et des partenaires financiers.
 
 
Les clés de réussite d’un dispositif BSA dans un réseau de franchise
- Structurer le dispositif dès le départ : documents juridiques, reporting, process d’octroi et de suivi.
 - Limiter le risque d’exposition : définir un pourcentage maximum de franchisés financés par ce biais.
 - Diversifier les solutions : combiner financement bancaire, leasing, aides publiques et BSA.
 - Impliquer les partenaires experts : avocats, experts-comptables, conseils financiers spécialisés en franchise.
 - Préserver la neutralité et la transparence : le BSA doit rester un levier, pas une contrainte.
 
Conclusion générale — Le BSA, un levier puissant à manier avec discernement
Le financement via BSA s’impose comme un outil stratégique de sécurisation et de développement pour les réseaux de franchise.
S’il permet de financer plus facilement les franchisés et d’accélérer la croissance du réseau, il doit être conçu avec prudence.
Une solution totalement externalisée expose le franchiseur à des risques structurels majeurs :
- perte de contrôle sur les franchisés financés,
 - risque de cession du point de vente à un concurrent,
 - perte d’un emplacement stratégique au profit d’un acteur tiers.
 
En revanche, une structure interne ou une solution hybride permet au franchiseur de :
- garder la main sur le financement et les emplacements,
 - protéger la valeur de son réseau,
 - et accompagner les franchisés sans dépendre d’acteurs externes.
 
Si une externalisation est choisie, il est indispensable de négocier des clauses de protection :
- droit de préemption sur le fonds ou les parts,
 - interdiction de cession à un concurrent,
 - information préalable en cas de défaut du franchisé.
 
Ainsi, le BSA devient non plus un simple instrument de financement, mais un véritable outil de gouvernance économique, au service de la stabilité du réseau, de la pérennité des franchisés et de la valorisation du savoir-faire du franchiseur.
Bien utilisé, il sécurise les acteurs et préserve l’indépendance et la cohérence du réseau de franchise.
				



