Dans l’univers de la franchise, les contentieux liés à la nullité du contrat sont lourds de conséquences.
Si la nullité est une sanction d’exception ; la gravité des conséquences est extrême, car celle-ci aboutit à l’anéantissement rétroactif du contrat ; obligeant le franchiseur condamné à une obligation de restitution : droit d’entrée, redevances, investissements…
Pour comprendre comment et pourquoi un contrat de franchise peut être annulé, il faut d’abord revenir simplement sur ce qu’est la nullité dans le droit commun des contrats.
Comprendre la nullité d’un contrat
En droit français, la nullité signifie que le contrat n’a jamais produit d’effets juridiques valables. Il s’agit de sa disparition rétroactive, comme si les parties n’avaient jamais été liées.
Le droit n’efface pas le souvenir économique, mais il annule la réalité juridique de la convention.
1. Les fondements de la nullité des contrats
La validité d’un contrat repose sur trois conditions essentielles :
- un consentement libre et éclairé,
- une capacité de contracter,
- un contenu licite et certain (articles 1128 et s. du Code civil).
Si l’une de ces conditions fait défaut, le contrat peut être annulé.
Ainsi, la nullité sanctionne :
- soit un vice du consentement (« si j’avais su, je n’aurais pas signé »),
- soit une atteinte à la licéité du contenu contractuel.
2. On distingue deux types de nullités
La nullité est relative, lorsque la condition de validité violée tend à protéger un intérêt particulier ou privé ; par exemple la nullité pour vice du consentement est relative, car elle protège l’intérêt privé du franchisé trompé.
À l’inverse, selon l’article 1179 du Code civil :
« La nullité est absolue lorsque la règle violée a pour objet la sauvegarde de l’intérêt général. »
C’est le cas par exemple lorsque l’objet d’un contrat viole une disposition d’ordre public. (ex : nullité d’un contrat de distribution de produits interdits à la vente …)
Nullité du contrat de franchise pour vice du consentement : enjeux et mécanismes
L’obligation d’information précontractuelle en franchise est le pilier de la transparence.
Avant de signer un contrat de franchise, un temps clé se joue : la phase précontractuelle. C’est à ce moment que le futur franchisé doit pouvoir comprendre dans quoi il s’engage.
Pour éviter les déséquilibres entre les parties, le droit français a instauré un encadrement précis de cette étape.
L’objectif est clair : garantir un consentement éclairé du franchisé, grâce à une information sincère, complète et loyale transmise par le franchiseur.
Deux sources assurent cette protection :
- la loi Doubin, texte spécifique à la franchise,
- et le droit commun des contrats, issu de la réforme du Code civil de 2016.
1. La loi Doubin : le socle historique de l’information en franchise
La loi du 31 décembre 1989, dite loi Doubin, constitue la première grande pierre de cet édifice.
Codifiée à l’article L. 330-3 du Code de commerce, elle impose au franchiseur de remettre au candidat un document d’information précontractuelle (DIP) au moins 20 jours avant la signature du contrat.
Ce document doit donner au futur franchisé une vision claire du réseau et de son environnement économique. Il comporte notamment :
- les informations juridiques et financières sur le franchiseur (identité, siège, dirigeants, immatriculation, situation financière, etc.) ;
- une présentation du réseau et de son évolution sur les cinq dernières années ;
- une analyse du marché concerné, au niveau national et local, avec ses perspectives de développement.
En revanche, la loi n’impose pas la communication de prévisionnels d’activité.
L’article R. 330-1 du Code de commerce est silencieux sur ce point, et la jurisprudence a confirmé cette exclusion (CA Paris, 4 déc. 2003, JurisData n°2003-233437).
Si le franchiseur choisit malgré tout de fournir des chiffres prévisionnels, ils doivent être réalistes et fondés sur des données sérieuses, faute de quoi sa responsabilité pourrait être engagée.
Les sanctions prévues en cas de manquement sont claires :
- une contravention de 5ᵉ classe (art. R. 330-2 C. com.),
- et, plus grave, la nullité du contrat de franchise si le défaut d’information a altéré le consentement du franchisé (Cass. com., 10 févr. 1998, Bull. civ. IV, n°71 ; CA Rennes, 26 nov. 2019, n°16/08767).
La loi Doubin reste donc aujourd’hui encore la référence en matière de transparence précontractuelle.
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2. Le droit commun : la bonne foi au cœur de la relation
Avant la réforme du code civil de 2016, la jurisprudence nous indiquait déjà que l’obligation du franchiseur ne se limitait pas à ce que la loi énumère seule.
Dans un arrêt du 26 juin 2024 (Cass. com., n° 23-14.085), la Cour de cassation rappelle qu’un franchiseur ne peut pas se retrancher derrière un DIP conforme pour taire une information essentielle.
Dans cette affaire, plusieurs franchisés avaient été placés en procédure collective entre la remise du DIP et la signature du contrat, sans que le candidat en soit informé. La Cour de cassation casse la décision d’appel : ce silence pouvait constituer un vice du consentement, même si le DIP respectait formellement la loi Doubin.
Autrement dit, l’obligation d’information précontractuelle ne s’arrête pas à la liste de l’article R.330-1 du Code de commerce : toute information déterminante doit être communiquée, même postérieurement à la remise du DIP.
Depuis la réforme du Code civil de 2016, le droit commun des contrats renforce ce dispositif via l’article 1112-1 du Code civil, qui généralise l’obligation d’information à toutes les relations contractuelles. Bien avant cette réforme, les tribunaux avaient déjà reconnu une telle exigence en s’appuyant sur le principe de bonne foi. Ainsi, la jurisprudence a pu sanctionner un franchiseur qui ne communiquait pas de données sérieuses sur la rentabilité de l’activité ou celui qui transmettait des prévisionnels manifestement erronés.
Désormais, le Code civil permet d’obtenir la nullité du contrat si le consentement du franchisé a été vicié (art. 1130 C. civ.).
Mais attention : toutes les erreurs ne justifient pas une annulation.
L’article 1136 du Code civil précise qu’une simple erreur d’appréciation économique ne suffit pas : seule une erreur sur une qualité essentielle du contrat peut entraîner la nullité. (Ex : si le Franchiseur a communiqué un prévisionnel qui s’avère manifestement éloigné de la réalité.)
En pratique : la transparence comme règle d’or
Le franchiseur est donc soumis à une double obligation d’information :
- une obligation spéciale, imposée par la loi Doubin, à travers la remise du DIP,
- une obligation générale, issue du Code civil, qui impose une information sincère et complète.
Dans les deux cas, la philosophie est la même : « Pas d’engagement sans connaissance. »
Le franchiseur doit donc fournir des données véridiques, cohérentes et actuelles. Une information lacunaire ou trompeuse peut non seulement entacher la confiance du réseau, mais aussi remettre en cause la validité même du contrat. En phase précontractuelle, il s’agit de séduire, mais sans mentir.
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Conclusion
L’information précontractuelle n’est pas une simple formalité administrative : c’est le socle de la relation de franchise.
Elle protège le franchisé contre les engagements irréfléchis et le franchiseur contre les contestations futures. En un mot, elle garantit l’équilibre et la loyauté d’une relation économique fondée sur la confiance.
Un DIP bien rédigé, des informations claires et des chiffres honnêtes : voilà les meilleurs gages d’une franchise durable.



